Quel rôle pour Attac face à l’invasion en Ukraine ?

Note sur l’invasion russe en Ukraine, élaborée dans l’espace international pour le Conseil d’administration d’Attac France du 19 mars 2022.

Le 21 février la Russie a reconnu l’indépendance des Républiques autoproclamées de Donetsk et Lougansk à l’Est de l’Ukraine, et a lancé une offensive militaire contre l’Ukraine le 24 février.

Il nous faut affirmer notre solidarité avec le peuple ukrainien contre l’agression du gouvernement russe. L’invasion de l’Ukraine par la Russie constitue une violation de la Charte des Nations unies et bafoue le droit d’auto-détermination des peuples, droit reconnu dans l’histoire par Lénine aux peuples soviétiques, dont l’Ukraine, co-fondatrice de l’URSS en 1922. Les bombardements touchent les civils, la ville de Kiev et plusieurs grandes villes sont assiégées, avec des carences en eau et biens de première nécessité.

Cette offensive s’appuie sur l’idéologie d’une grande Russie, c’est une politique impérialiste qui méprise les droits des peuples. Face aux logiques des grandes puissances, il est indispensable pour le mouvement altermondialiste de refuser les logiques nationalistes, d’oppression nationale et de construire une solidarité « par en bas » avec les mouvements de la société civile ukrainienne qui résistent et s’organisent dans les pires conditions. Nous soutenons leur droit à l’auto-défense. L’agression armée est aussi l’écrasement des mouvements démocratiques ; nous sommes tout particulièrement aux côtés des associations ukrainiennes qui dénoncent cette guerre tout en s’étant battues contre la privatisation de leur pays par les oligarques, en défense des droits sociaux contre les politiques du FMI et contre toutes les mesures restreignant la consolidation démocratique donc pluraliste de leur pays contre la loi de « décommunisation ».

Nous soutenons en même temps le mouvement anti-guerre qui grandit en Russie, malgré les risques considérables. Des marches de contestation se développent dans plusieurs villes et font écho à la détermination des ukrainien-nes. Des journalistes, une part importante d’universitaires, des élus du PC, les milieux syndicalistes, altermondialistes se mobilisent, de même que les féministes, qui constituent l’une des rares forces encore sur pied en Russie. Elles dénoncent la politique impérialiste et autoritaire du régime de Poutine et appellent les féministes du monde entier à rejoindre les mouvements anti-guerre et à organiser leurs propres actions. Nous devons contribuer à l’impulsion des stratégies collectives au niveau international, en premier lieu en Europe, pour soutenir ces mobilisations, qui sont un enjeu majeur susceptible de jouer sur le rapport de force et de fragiliser la position du dictateur.

Refuser cette guerre ne peut pas pour autant légitimer une extension de l’OTAN : nous dénonçons les politiques réelles de maintien et d’extension de l’OTAN depuis 1991, après donc la dissolution du Pacte de Varsovie. Les grandes puissances occidentales ont montré l’inefficacité de l’extension de l’OTAN, elles tentent aujourd’hui de ménager un équilibre difficile entre l’ambition de sanctions contre la Russie et leur propre dépendance vis-à-vis d’elle, notamment énergétique. Les sanctions qui ciblent les dirigeants russes et les oligarques ou la banque centrale peuvent être utiles mais nous refusons des sanctions qui pénalisent la population. Aujourd’hui, il n’y a pas de solution militaire au conflit ukrainien - mais au contraire un risque d’embrasement sans précédent depuis la seconde guerre mondiale, renforcé par la menace nucléaire. Les centrales nucléaires ukrainiennes apparaissent comme un enjeu stratégique, notamment pour l’armée russe, et pour « faire pression » sur les pays occidentaux sur les plans politiques, économiques, ou sur les enjeux énergétiques. La guerre de l’énergie comme la guerre tout court qui touche en premier lieu les ukrainien-nes menace tous les peuples.

Nous chercherons le lien avec nos ami-es et camarades d’Ukraine et de Russie dans le maximum d’actions concrètes de solidarité - notamment :

  • pour l’accueil des réfugié-es en provenance d’Ukraine contre toutes les pratiques et discours de discrimination racistes notamment envers les immigré-es vivant en Ukraine et les exilé-es politiques, l’envoi de matériel demandé par les associations de la société civile ukrainienne,
  • pour l’annulation de la dette qui étrangle l’Ukraine et l’a placée en étau entre la guerre du gaz, guerre tout court et les conditionnements anti-sociaux du FMI et de l’UE.

Au-delà nous devons radicaliser notre remise en cause des sources de ces guerres : un ordre mondial d’affrontement entre grandes puissances, de plus en plus porteuses de nouvelles courses aux armements et de risques de guerres nucléaires, destructrices des droits humains, des libertés et de l’environnement : nous appelons à un front de résistance internationaliste qui permette de rassembler diverses forces mobilisées contre tous les rapports de domination, pour un autre mode de production et de répartition des richesses basés sur une justice environnementale, pour le démantèlement des armes nucléaires et des blocs militaires : l’OTAN en même temps que l’OTSC, organisation militaire déployée autour de la Russie qui réprime les mouvements sociaux au Kazakhstan. C’est sur la base d’une nouvelle architecture des droits qu’il s’agit pour nous de défendre une sécurité collective dans le cadre d’une Charte actualisée des Nations unies et de l’OSCE.

Les principales questions qui restent en débat portent sur la condamnation, ou non, de la livraison d’armes à l’Ukraine, sur la différenciation à opérer, ou non, entre le peuple et le gouvernement ukrainien en cette période de guerre. Les débats doivent pouvoir se poursuivre dans Attac et dans les réseaux de gauche en France et en Europe.

Attac peut contribuer à approfondir certaines questions, notamment :

  • les enjeux des ressources et de l’énergie, leur impact dans le conflit ;
  • la question des sanctions à lier avec la lutte contre les paradis fiscaux ;
  • la nécessité de repenser la sécurité commune, notamment en Europe.

Actions concrètes envisagées dans les jours et semaines à venir :

  • participer aux mobilisations contre la guerre et en soutien à la résistance du peuple ukrainien ; un comité de solidarité avec l’Ukraine a été créé à l’initiative du Cedetim, Attac y participe et cela permet de créer un arc de force de mouvements sociaux, syndicats, etc. avec qui s’organiser pour ces mobilisations ;
  • contribuer au développement de ces initiatives au niveau international, en lien avec les organisations ukrainiennes, russes, notamment, la mise en place d’un Réseau européen contre la guerre (auquel Attac participe déjà) ;
  • participer aux actions de solidarité concrète des mouvements sociaux avec le peuple ukrainien, convoi ou train… Dont cette initiative : « Un convoi syndical pour l’Ukraine - Appel unitaire des organisations syndicales françaises ! » ;
  • soutenir concrètement les réfugié-es ukrainien-nes arrivant en France, avec un accent particulier pour les réfugié-es non-ukrainien-nes, largement discriminés, en particulier les étudiants étrangers très nombreux en Ukraine, un axe important pour les militant-es d’Attac dans les établissement d’enseignement supérieur, étudiant-es ou enseignant-es ;
  • accueillir les exilé-es russes opposant au régime de Poutine qui arrivent en France et contribuer aux échanges en France, autour d’un pôle identifié de gauche, notamment entre camarades de Russie, d’Ukraine, des pays d’Europe de l’Est ;
  • intervenir dans la campagne présidentielle sur l’impunité des multinationales présentes en Russie, en particulier Total, mais aussi sur le rôle de l’OTAN et les dépenses militaires de la France. Poser la question des intérêts pour les groupes français et dénoncer la politique à "géométrie variable" de la France en terme de dialogue avec les régimes autoritaires.

Attac contribue à la diffusion d’informations et d’analyses avec des angles différents :

  • La conférence « Ukraine : face à la guerre, solidarité internationaliste ! » du 21 mars dernier. Sanctions économiques, enjeux militaires, dette ukrainienne, accueil des réfugié-es, soutien aux pacifistes russes… ces questions sont aussi des enjeux pour les mouvements sociaux qui luttent pour un monde débarrassé des guerres et de la violence.
    En présence de Karine Clément (sociologue, spécialiste des mouvements sociaux russes) ; Pierre Coutaz (syndicaliste, secrétariat international de la CGT) ; Bernard Dréano (membre de l’Assemblée européenne des citoyens). Animé par Vincent Gay (membre du bureau d’Attac France). La conférence est à revoir en cliquant ici.
  • La rubrique Ukraine en ligne sur le site d’Attac, accessible ici.

P.-S.

Photo d’illustration : « Москва. Марш мира против войны с Украиной » by varfolomeev is marked with CC BY-NC 2.0.

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