Après les Résistantes, amplifier les luttes pour le vivant

mardi 17 octobre 2023, par Attac France

L’espace de mobilisation et d’expertise « Écologie et société » s’est donné pour ambition de porter un autre regard sur le monde, en mettant en lien les problématiques environnementales avec les questions sociales et démocratiques, et en redonnant à la nature toute son existence. Voici l’article principal de la 4e lettre d’informations de cet espace de travail d’Attac.

Retrouvez toutes les lettres de l’espace « Écologie et société » en suivant ce lien : https://vie-interne.attac.org/espaces-de-travail/ecologie-et-societe/article/lettres-de-l-espace-ecologie-et-societe

Dans la Lettre de l’espace Ecologie et Société n°4, on pourra également lire d’autres articles : À la recherche de l’ennemi intérieur ; Débordements (et purges) du convoi de l’eau (récit) ; Méga-bassines : d’un tribunal à l’autre.

Les rencontres des Résistantes au Larzac du 3 au 7 août ont été un succès, rassemblant 7500 personnes. Le programme http://lesresistantes2023.fr/programme/ était très riche, avec des tables rondes, des ateliers et des assemblées. Au-delà des débats plus ou moins connus, le rassemblement a surtout été l’occasion de faire se rencontrer des réseaux qui depuis quelques années se créent et regroupent des luttes locales sur une thématique donnée. Si cela n’est pas complètement nouveau, l’écologie militante ayant toujours été active dans des initiatives ancrées territorialement, la multiplication de ces réseaux et les thématiques traitées indiquent que cette écologie de terrain a pris une nouvelle envergure. Alors que peu de de territoires sont épargnés par des projets écocides, la constitution de ces réseaux permet à ces luttes de se sentir moins isolées, d’échanger sur leurs pratiques, et de parler d’une seule voix quand le besoin s’en fait sentir.
Les Résistantes ont été l’occasion d’organiser des assemblées de réseaux existants, ou créés à cette occasion. En quelques lignes, nous présentons ci-dessous une partie des assemblées de ces réseaux qui se sont tenus sur le Larzac cet été.

Assemblée des luttes contre les fermes usines

Les fermes usines se caractérisent par :

  • une production dont les matières premières sont sans lien avec le sol de l’exploitation, et viennent de circuits d’importation déterritorialisés et/ou internationalisés ;
  • des animaux et des végétaux standardisés avec utilisation systématique de traitements chimiques ;
  • des circuits de vente hors territoire, gérés par des groupes industriels ;
  • une gestion des déjections basée sur l’exportation hors territoire ;
  • des conditions de vie animale inadaptées à leurs besoins.

Si on a beaucoup parlé il y a quelques années de la ferme des milles vaches, ce type d’exploitation est massivement présent dans certaines régions, en Bretagne particulièrement, avec des conséquences sociales et environnementales désastreuses : pollutions massives, nombre d’emplois très faible, pilotage par des grands groupes de l’agro-business… On est très loin ici de l’agriculture paysanne, et même de l’agriculture tout court. Le réseau Résistances Aux Fermes Usines (RAFU) cherche à faire reconnaître la réalité de ces fermes usines et les dégâts qu’elles provoquent. Sa première revendication est un moratoire sur les projets d’établissements agricoles aux méthodes industrielles (extensions ou créations), afin que la question agricole et de l’alimentation donne lieu à des débats publics. Le 7 octobre a eu lieu une première journée d’action coordonnées contre les fermes usines, à l’occasion de l’examen du projet de Loi d’Orientation de l’Avenir Agricole. Alors que l’agro-industrie prospère grâce au silence dans les champs (pour reprendre le titre du livre de Nicolas Legendre consacré au système agricole breton), il est plus que nécessaire de faire un gros raffut pour mettre fin au productivisme agricole.
Pour plus d’informations : https://resistancesauxfermesusines.fr/

Assemblée contre l’Agrivoltaïsme

Les entreprises de production d’électricité installent des panneaux solaires sur des terres agricoles, soit disant couplés à une activité agricole. Alors que les usages des terres agricoles deviennent un enjeu majeur, de tels projets contribuent à l’artificialisation des sols et à l’augmentation du prix du foncier agricole. Si ces installations peuvent constituer une manne financière pour quelques agriculteurs, elles renforcent les logiques de concentration des terres dans les mains de quelques-uns, au détriment de la production agricole le plus souvent. Alors que plusieurs rapports de l’ADEME signalent la disponibilité suffisante de gisements en toitures et friches industrielles et appelle à « éviter d’occuper des sols agricoles » pour installer des énergies renouvelables, l’Assemblée contre l’Agrovoltaïsme a commencé avec des présentations du dossier paru dans Silence, puis différents représentant·es de luttes locales se sont exprimé·es. Il a été décidé de rédiger un texte unitaire, qui a été signé par plusieurs réseaux et organisations courant septembre, dont notamment des comités locaux d’Attac.

Assemblée des luttes contre les entrepôts et les flux logistiques

Au cœur du développement contemporain du capitalisme, le secteur de la logistique prend une place de plus en plus importante sur nos territoires. La croissance du commerce en ligne, la déréglementation du marché des transports… font de ce secteur un des plus importants pour l’embauche des ouvriers. La construction implique d’utiliser des terres mais aussi de construire des infrastructures routières pour faire circuler tous ces flux de marchandises. La stratégie, les argumentaires des aménageurs sont partout identiques ainsi que les moyens utilisés, notamment le chantage à la création d’emplois. L’assemblée a réuni la Coopération des Luttes Locales Centre et les Amis de la Terre. Les différentes luttes contre les plateformes logistiques et l’organisation des associations et collectifs se sont présentées, suite à quoi lancement d’une nouvelle coalition nationale des luttes contre les plateformes logistiques a été décidé. La stratégie est de mettre en place une enquête participative afin de produire des diagnostics sur les territoires concernés, de co-construire un argumentaire et des revendications nationales et de mener des luttes coordonnées.

Assemblée de la Déroute des routes

Il y a un lien évident entre les plateformes logistiques, le flux de marchandises et les entrepôts logistiques : :"le plus grand entrepôt logistique est sur la route" comme l’ont souligné les participant.es à cette assemblée. Après les mobilisations du printemps contre l’A69 et contre le projet de contournement Est de Rouen, la Déroute des Routes (coalition de plus de 50 collectifs en lutte contre des projets routiers partout en France, soutenus par de nombreuses associations) a lancé une saison automne 2023 de mobilisations, pour défendre une demande de moratoire national afin que les projets routiers soient réétudiés au regard du changement climatique. Cette demande de moratoire s’accompagne d’un travail commun de diagnostique financier, environnemental et de plaidoyer auprès des députés et sénateurs tout en continuant leur propre mobilisation. Le journal Reporterre s’associe à cette lutte et publie la carte des luttes et le coût des projets.
Pour plus d’informations :
https://www.laderoutedesroutes.com
https://basta.media/faut-il-stopper-tous-les-nouveaux-projets-routiers-deroute-des-routes-vendredi-debats

Assemblée des Luttes pour l’eau

La lutte contre les mégabassines et les sécheresses à répétition ont mis sur le devant de la scène la question de l’eau, problème essentiel pour les écosystèmes, qui touche la plupart des pays et qui donne lieu depuis plusieurs années à de nombreuses luttes.
Cette assemblée a été organisée pour engager une coordination nationale de ces différentes luttes.
Dans un premier temps, les collectifs se sont présentés par thématique :

  • Tourisme : lac de Montbel en Ariège, Stop croisières, arrêt des canons à neige pour les pistes de ski, contre l’extension de ports de plaisance…
  • Agriculture : coordination eau 34, eaux à gué Rochegude, plaine de la Limagne – Limagrain, Berry, Bassines Non Merci 86, BNM 79, Confédération Paysanne… La discussion s’en engagée sur les pratiques et les usages de l’eau, hydrologie régénérative, les pratiques des castors…
  • Pollution : contre des projets de déchetterie (Corse), les usages de l’eau dans l’industrie nucléaire (réseau Sortir du Nucléaire), des puces électroniques (Stop micro), ou chez les fabricants de laine de roche (vallée du Grésivaudan, Vercors)
  • Extractivisme : contre la relance de mines de lithium (Allier), mais aussi des projets de gravières (Ariège)
  • Embouteillage : les multinationales de l’eau en bouteille (Vittel, Volvic…) font face à des contestations (notamment l’association Preva Auvergne63)
  • Milieu urbain : pour le maintien ou la création de régies publiques de l’eau, considérant que l’eau doit être un bien commun, géré publiquement, posant la question des financements publics, de l’entretien des réseaux d’assainissement…
    Ce tour d’horizon a permis de voir que les luttes pour l’eau se trouvaient dans la plus grande partie des luttes territoriales en cours, et que les collectifs sur ces thématiques étaient très nombreux.

Assemblée des comités locaux des soulèvements de la terre

A la fin du mois de mars, lors des menaces de dissolution, les Soulèvements de la Terre ont appelé à créer des comités locaux ; aujourd’hui il en existe environ 200. Ceux-ci se réunissent lors des différents actes des Soulèvements. Les Résistantes ont été aussi une occasion de rencontres, 64 comités étaient présents. Durant l’assemblée, ceux-ci se sont réunis par régions, pour échanger. Des volontaires se sont proposés pour co-préparer l’inter-comités prévu pour la fin du mois de septembre qui s’est tenue avec près de 300 personnes. Au-delà de la question de la répression, l’année 2023 constitue un grand pas en avant pour les Soulèvements de la Terre, ce qui appelle des transformations dans les formes d’organisation et de coordination.
Pour plus d’informations : https://lessoulevementsdelaterre.org/

Assemblée des coalitions de luttes régionales

Alors que de nombreuses luttes se réclament du local, la nécessité de leur coordination à une échelle plus grande est posée depuis plusieurs années. Dans plusieurs endroits, des coordinations régionales existent (Coopération des Lutes locales Centre, coordination Île-de-France…). Elles ont constaté que leur fonctionnement était globalement similaire et ont décidé de travailler avec celles qui sont géographiquement limitrophes
Cette coalition en est à son balbutiement, l’aspect matériel est pour l’instant un frein : lieux de rencontres, outils de communications, déplacements... autant de points à résoudre avant de concrétiser une rencontre qui permettra d’amplifier ces luttes et faire caisse de résonnance.

Assemblée de la coordination des luttes antinucléaires

Alors que le mouvement antinucléaire peine depuis plusieurs années à agir, hormis contre l’enfouissement des déchets à Bure, cette assemblée qui a réuni 200 personnes marque un renouveau encourageant.
L’annonce par E. Macron de la construction de 6 nouveaux EPR et le débat public de la Commission Nationale du Débat Public (CNDP) complètement ignoré par le gouvernement ont montré la nécessité de réagir et d’unir les différentes composantes du mouvement antinucléaire. Un rassemblement devant la CNDP le 8 novembre à Paris a été suivi d’une première rencontre. La deuxième a eu lieu à Tours en février lors d’une manifestation. La dynamique lancée a croisé celle de Bure, en lutte depuis 30 ans. Puis une rencontre a eu lieu à Paris entre différents groupes pour lancer une nouvelle coordination nationale. A cela s’est ajoutée une déclaration de plus de 1000 scientifiques opposés à la relance du nucléaire. Un calendrier de mobilisations a commencé à être élaboré, entre septembre 2023 et le second semestre 2024, avec l’idée de coordonner des actions au niveau régional.

Assemblée pour des forêts vivantes

Une Assemblée pour des forêts vivantes, a rassemblé différents collectifs, certains anciens et d’autres plus récents. Depuis plusieurs années, partout sur le territoire, ces collectifs se montent pour défendre les forêts face à la prédation de financiers guidés par la rentabilité immédiate, alors que les écosystèmes forestiers doivent déjà faire face au réchauffement climatique et à la chute de la biodiversité. De cette assemblée, il est ressorti un besoin permanent de formation et d’information sur les écosystèmes, sur les différents modes de gestion forestière, sur les règles qui gouvernent le tiers de notre territoire et surtout, un besoin de mutualisation accrue des moyens de lutte pour protéger les forêts.
Pour en savoir plus : https://sosforetfrance.org/index.php/le-collectif-sos-foret-france/

Assemblée des naturalistes des terres

Début 2023 est créé un réseau de naturalistes en lutte dont l’objectif est d’utiliser la pratique naturaliste dans nos luttes mais aussi de nourrir et/ou renforcer les liens sensibles que nous avons avec les êtres vivants et leurs écosystèmes. Le réseau utilise le terme naturaliste avec une acception large et se veut donc ouvert aux débutant.es, confirmé.es, sympathisant.es ou praticien.nes. Il l’utilise donc avec l’objectif de le soustraire aux dominant.es et dans une perspective d’éducation populaire.
La volonté des NDTR est de venir apporter une aide auprès des luttes locales qui en ont besoin, à des fins de contre-expertise naturaliste mais aussi et surtout d’appropriation des enjeux écologiques des sites pour les habitant.es, de transmission de savoirs. C’est aussi l’occasion de nous imprégner des lieux à défendre, de découvrir d’autres modes d’action joyeux et revitalisant, de mailler la résistance.
L’Assemblée a été l’occasion de faire connaître le réseau et de présenter la carte interactive permettant aux naturalistes de rejoindre le réseau, et aux luttes de les solliciter. Le réseau proposera régulièrement des visios, des moments de présentation et de rencontres élargies afin de s’organiser, se retrouver, refaire communauté entre humain.es et non-humains.

Assemblée des Jardins Populaires en lutte

Alors que les villes sont devenues des îlots de chaleur urbains, qui subissent d’autant plus les effets des changements climatiques, les politiques municipales, qui adorent mettre en avant leurs plantations d’arbres, n’en sacrifient pas moins des espaces végétalisés, et notamment des jardins urbains. Or, ces jardins, outre leur intérêt écologique, sont aussi des lieux de maintien et de défense de cultures populaires. Cela n’empêche pas pour autant les menaces et destructions, comme aux Vaites à Besançon, ou les jardins ouvriers d’Aubervilliers, en partie détruits, malgré une victoire juridique, pour les travaux des Jeux Olympiques. Une coordination des Jardins Populaires s’est créée il y a quelques années, à partir de ces deux cas, rejoints par d’autres collectifs engagés dans la défense des jardins urbains souvent situés dans des quartiers populaires.

J’agis avec Attac !

Je m’informe

Je passe à l’Attac !

En remplissant ce formulaire vous pourrez être inscrit à notre liste de diffusion. Vous pourrez à tout moment vous désabonner en cliquant sur le lien de désinscription présent en fin des courriels envoyés. Ces données ne seront pas redonnées à des tiers. En cas de question ou de demande, vous pouvez nous contacter : attacfr@attac.org